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A ce jour, 129 juridictions participent à la Convention multilatérale concernant l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale.

http://www.oecd.org/ctp/exchange-of-tax-information/Status_of_convention.pdf

Cette convention qui relève des travaux de l’OCDE et du Conseil de l’Europe a pour but de mettre en place une coopération en matière fiscale entre différents états et plus précisément entre les différentes juridictions, afin de lutter contre l’évasion et la fraude fiscale à l’échelle internationale, mais aussi afin de lutter contre le blanchiment et la corruption.

Cette convention élaborée en 1998, depuis amendée (en 2010 par un protocole) a pour but de permettre un échange d’informations en matière fiscale entre différents états, cet échange de renseignement peut se faire sur demande, spontanément ou automatiquement.

Cette convention prévoit aussi une assistance mutuelle pour le recouvrement des impositions notamment, mais aussi une assistance en matière de transmission de documents administratifs et permet de faciliter les opérations de vérification.

Cette convention est très importante notamment au regard de son champs d’application puisque celle-ci s’applique : aux impôts sur les revenus et sur les bénéfices ; aux impôts portant sur les capital gain (plus-value) ; aux cotisations de sécurité sociale obligatoires due aux administrations publiques ou aux organismes de sécurité sociale de droit public ; sur les droits de succession et de donation ; sur la TVA … (Cette liste est non exhaustive, pour un aperçu complet des impôts visés par cette convention nous vous renvoyons à l’article 2 du Chapitre I de la présente Convention).

Nous allons vous donner un exemple afin d ‘illustrer cet échange automatique d’information.

La France et l’Italie ont signé cette convention multilatérale, par ailleurs la France et l’Italie ont signé le 20 décembre 1990 à Rome, une convention bilatérale (donc applicable uniquement entre ces deux pays) portant sur les droits de donation et de succession.

Vous êtes par exemple résident italien et souhaitait faire une donation à l’un de vos enfants, le bien que vous souhaitez donner est un bien meuble corporel (ex : bien d’une valeur de ½ millions d’euros), ce bien corporel n’est donc pas un bien tel que défini aux articles 5 à 8 (inclus) de la convention bilatérale signée entre la France et l’Italie.

En application de l’article 9 de la convention bilatérale ce serait normalement le pays du domicile fiscal du donateur qui devrait être compétent pour imposer cette donation, peu importe le lieu de situation de ce bien.

Toutefois si ce bien est situé en France, il se pourrait que le redevable des droits de donation soit tenté de ne pas déclarer la donation en Italie, en estimant que l’Italie n’aura pas connaissance de cette donation. Cette donation ne devant pas être imposée en France puisque la France n’est pas compétente pour imposer cela au regard de l‘article 9 de la convention, on pourrait arriver à une situation de double « exonération ». Or une telle « exonération » ne relèverait pas d’une disposition juridique mais uniquement d’une manœuvre frauduleuse, (manœuvres que nous prohibons bien évidement).

Si les administrations italiennes s’aperçoivent qu’une donation a été effectuée mais que toutefois, aucune déclaration de donation n’a été effectuée en Italie et que aucun droit de donation n’a été acquitté dans ce pays.

Les autorités italiennes pourront, sans difficultés demander l’assistance de la France afin d‘obtenir divers documents qui pourraient permettre d’identifier la fraude et demander l’assistance de cette dernière pour aider au recouvrement de la créance fiscale (ex : le donateur italien est insolvable en Italie, toutes ses liquidités ont été transférées sur des comptes bancaires français).

Concernant les échanges de renseignements, nous avons rappelé plus haut que ceux-ci peuvent être effectués sur demande.

C’est le cas lorsque par exemple un état (état requérant) demande à un autre état de lui fournir un renseignement (entrant dans le champ d’application de l’article 4 du Chapitre III de la Convention). Ce renseignement devra porter sur une personne ou sur une transaction déterminée.

L’état à qui est demandé ledit renseignement devra adresser celui-ci à l’état requérant sauf s’il ne dispose pas dudit renseignement, dans ces cas-là ce dernier devra toutefois prendre « toutes les mesures nécessaires » afin de pouvoir donner ce renseignement à l’état requérant, une obligation positive pèse donc sur l’état à qui est demandé l’information.

Cet échange de renseignement peut aussi être automatiquement, dans ces cas-là les états s’accordent afin d’échanger directement des renseignements sans demande préalable.

Dernier cas, c’est l’échange spontanée, dans ces cas-là un état (pas besoin d’accord commun comme précédemment) décide d’adresser des renseignements à un autre état, sans que celui-ci ne lui ait demandé préalablement.

Cet échange spontané survient, lorsqu’un état soupçonne des manœuvres frauduleuses de la part d’un ou plusieurs contribuables.  Une liste a été dressé à l’article 7 du Chapitre III, des divers cas dans lesquels un état pourrait décider de transmettre spontanément des informations à un autre état.

A noter qu’un garde-fou existe puisque l’article 4 du Chapitre III de la Convention, précise que les échanges de renseignements sont possibles uniquement si les renseignements échangés sont « vraisemblablement pertinents », ces termes empêchent dès lors les différents états à tenter d’obtenir diverses informations, trop générales qui n’auraient pas de lien pertinent avec l’affaire dont ils auraient à traiter mais dont le but serait uniquement de récupérer des informations sur les contribuables.

De plus, les informations échangées entre les états sont confidentielles, elles ne peuvent être transmises qu’aux personnes et autorités concernées par ou chargées de l’établissement ou du recouvrement de l’impôt. Un particulier n’aura dès lors pas accès à ces informations.

La doctrine administrative nommée BOFIP (BOI-INT-DG-20-60-20190621), précise que :« Cette règle de confidentialité s’applique tant à la demande d’assistance elle-même qu’aux éléments transmis en réponse à une telle demande. Il est toutefois possible de divulguer des informations contenues dans la demande, dès lors qu’elles sont nécessaires pour l’obtention des renseignements demandés.

Les informations reçues d’un autre État peuvent, avec l’accord écrit de cet État, être utilisées à des fins autres que fiscales si cela est autorisé par les dispositions d’échange de renseignements en vigueur entre la France et l’autre État. »

Cette convention multilatérale est donc un outil formidable dans le cadre de l’échange de renseignements en vue de lutter contre la fraude fiscale, mais c’est aussi un outil remarquable pour le recouvrement des créances fiscales.

Certes la France a signé, un certain nombre de conventions bilatérales fiscales, prévoyant au moins un article sur l’assistance en matière de recouvrement de créance fiscale, toutefois, avec cette convention multilatérale ce n’est pas moins de 129 juridictions différentes qui s’accordent afin de s’entraider dans le recouvrement des créances fiscales.

L’assistance en matière de recouvrement, permet aux différents états de s’entraider afin de leur permettre de recouvrer les différentes créances fiscales, qui pourraient leur être dues. C’est par exemple l’assistance que portera la France à l’Italie, dans notre exemple précédent où le résident italien a organisé son insolvabilité en Italie. L’Italie dans ces cas devra requérir l’assistance de la France, puisqu’elle ne pourra d’elle-même « engager une action en recouvrement des impôts à l’extérieur de leurs frontières. » (BOI-INT-DG-20-60-20190621§110)

Ce recouvrement des créances fiscales, dont le terme de créances fiscales est entendu largement puisqu’il s’agit « d’une somme due au titre d’impôts couverts par la convention ainsi que les intérêts, les pénalités administratives correspondantes et les coûts de recouvrement ou de conservation liés à ces sommes ».

En matière de recouvrement de créances fiscales, un état (ex : l’Italie) va demander à l’autre état (ex : la France) qu’elle recouvre les créances fiscales, comme si c’était les siennes. Ce recouvrement se fera donc en vertu des lois françaises (puisque dans notre cas c’est la France qui recouvrira les créances pour le compte de l’Italie).

Avec toujours un garde-fou prévu, tel que le rappelle le BOFIP (BOI-INT-DG-20-60-20190621§130) qui précise que : « les questions portant sur l’existence de la créance et/ou de l’instrument permettant son recouvrement (titre exécutoire) demeurent exclusivement régies par la législation de l’État requérant. Par conséquent, les actions intentées contre l’existence, la validité ou les montants de la créance doivent être intentées devant les tribunaux ou organes administratifs de l’État requérant.

Un État peut demander à un autre État d’adopter des mesures conservatoires même si la créance est contestée ou si le titre exécutoire n’a pas encore été émis. »

Pour que ces mesures d’assistance de recouvrement soient possibles il faudra toutefois que les créances fiscales soient exigibles, qu’elles ne soient pas prescrites dans l’état requérant.

Un autre garde-fou est présent comme le rappelle le BOFIP en son §170 puisque : « Cette obligation d’assurer le recouvrement d’une créance fiscale à la demande de l’autre État peut être levée dans certaines situations.

Ainsi, l’État qui reçoit une demande d’assistance au recouvrement peut refuser d’apporter son assistance si celle-ci l’oblige à  :

  • prendre des mesures administratives dérogeant à sa législation et à sa pratique administrative ou à celles de l’autre État contractant (principe de réciprocité sous-jacent) ;
  • prendre des mesures contraires à l’ordre public (caractère confiscatoire de l’imposition de l’État requérant, par exemple) ;
  • prêter assistance si l’autre État contractant n’a pas pris toutes les mesures raisonnables de recouvrement ou de conservation, selon les cas, qui sont disponibles en vertu de sa législation ou de sa pratique administrative ;
  • prêter assistance dans les cas où la charge administrative qui en résulte pour cet État est nettement disproportionnée par rapport aux avantages qui peuvent en être tirés par l’autre État contractant. »