L’imposition des plus-values immobilières réalisées en France par des résidents monégasques de nationalité française

plus-values immobilières réalisées en France

La convention fiscale franco-monégasque signée à Paris le 18 mai 1963, ne permet pas aux nationaux français, souhaitant établir leur résidence fiscale à Monaco de ne plus être soumis à l’impôt sur les revenus en France.

L’article 7 de ladite convention (modifié par un avenant en date du 26 mai 2003) énonce que : « Les personnes physiques de nationalité française qui transporteront à Monaco leur domicile ou leur résidence – ou qui ne peuvent pas justifier de cinq ans de résidence habituelle à Monaco à la date du 13 octobre 1962 – seront assujetties en France à l’impôt sur le revenu des personnes physiques et à la taxe complémentaire dans les mêmes conditions que si elles avaient leur domicile ou leur résidence en France. »

Deux exceptions existent toutefois et elles concernent : « Les personnes faisant partie ou relevant de la maison souveraine et les fonctionnaires, agents et employés des services publics de la Principauté́ qui ont établi leur résidence habituelle à Monaco antérieurement au 13 octobre 1962. »
Si demain une personne de nationalité française décidait de s’expatrier à Monaco et d’y établir sa résidence fiscale et que cette personne n’est pas une partie ou ne relève pas de la maison souveraine, elle resterait soumise à l’impôt sur les revenus en France, malgré que sa résidence soit établie à Monaco.

Si une personne résidente à Monaco mais de nationalité française, donc soumise à l’impôt sur les revenus en France, disposait d’un bien immobilier en France et décidait de le vendre, quel serait le régime fiscal applicable à son cas ?
En cas de réalisation d’une plus-value, cette personne serait-elle imposée en application des articles 150 U du CGI ou à raison du prélèvement prévu à l’article 244 bis A du CGI ?

Cette interrogation vient d’être résolue par le Conseil d’État, le 21 juin 2021.

Pour comprendre la décision du Conseil d’état, il faut rappeler les faits : deux époux (X) ressortissants français fiscalement domiciliés à Monaco, opèrent deux cessions à titre onéreuses et réalisent une plus-value immobilière en 2013, ces plus-values sont soumises à l’impôt sur les revenus et aux contributions sociales.

Les époux X demandent la restitution du montant des contributions sociales acquittées, leur demande n’obtenant pas une position favorable devant les services de l’administration fiscale française, le litige est porté devant le Tribunal Administratif de Grenoble.

Le tribunal administratif de Grenoble rejette leur demande de restitution du montant des contributions sociales acquittées.

Les époux X décident de faire appel du jugement du TA de Grenoble en date du 28 juin 2018.

Le litige est porté devant la Cour d’Appel de Lyon.

L’argument principal des époux X consiste à faire une application combinée de l’article 7 de la convention franco-monégasque et de l’article 150 U du CGI. Selon l’argument avancé par les époux X ces derniers sont imposés en France au regard de l’article 7 de la convention fiscale entre la France et Monaco et non en application de l’article 4 B du CGI.

Ces derniers avancent également qu’au regard du cas présent et de leur situation, l’imposition de la plus-value doit être établie au regard de l’article 150 U du CGI et non de l’article 244 bis A du CGI.

Ne pas vouloir une application à leur cas des articles 4B et 244 bis A du CGI a une incidence directe sur l’assujettissement aux contributions sociales.

En effet, l’article L.136-7 du code de la sécurité sociale (dans sa version en vigueur au moment du fait générateur de l’imposition) disposait que: “I.- Lorsqu’ils sont payés à des personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du CGI, les produits de placements () sont assujettis à une contribution (). I bis. – Sont également soumises à la contribution les plus-values imposées au prélèvement mentionné à l’article 244 bis A du CGI lorsqu’elles sont réalisées, directement ou indirectement, par des personnes physiques.”.

Dès lors, si nous faisons une lecture stricte de cet article seules les personnes soumises aux dispositions citées (dans cet extrait de l’article : les personnes soumises aux dispositions de l’article 4B ou 244 bis A du CGI) devraient être assujettis aux contributions sociales.

Selon les juges de la CAA, si les époux X sont imposés en France au regard de l’article 7 de la convention fiscale entre la France et Monaco et en application des dispositions prévues à l’article 150 U du CGI, ils ne devraient pas être soumis aux contributions telles que prévues à l’article L.136-7 du code de la sécurité sociale.

C’est la position retenue par la Cour d’Appel de Lyon, le 14 janvier 2020. La solution de la CAA de Lyon (prise en contradiction avec les conclusions du rapporteur public) est « qu’en l’espèce, les époux X (NDRL), qui ont établis leur domicile à Monaco postérieurement au 13 octobre 1962, ont acquitté, à raison de la cession, le 29 novembre 2013, de biens immobiliers situés (…) des contributions sociales au taux de 15,5 %, d’un montant total de 51 788 euros, dont ils ont demandé la restitution le 30 octobre 2015. Pour justifier l’assujettissement des époux X (NDRL) à ces contributions, l’administration invoque le I bis de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale auquel renvoient directement ou indirectement les articles 1600-0 D, 1600-0 F bis, 1600-0 H et 1600-0 S du CGI. Toutefois, les époux X (NDRL), qui ne sont pas fiscalement domiciliés en France au sens de l’article 4 B du CGI mais sont imposables à l’impôt sur le revenu en France sur le seul fondement de l’article 7 de la convention fiscale franco-monégasque, soutiennent, sans être contredits, que la plus-value qu’ils ont réalisée lors de la cession de ces biens immobiliers n’a pas été soumise au prélèvement mentionné à l’article 244 bis A du CGI, lequel n’était au demeurant pas applicable dans leur situation. Dans ces conditions, les époux X (NDRL) ne pouvaient être assujettis aux contributions sociales sur le fondement du I bis de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale. »

Un pourvoi a été formé par le ministre de l’action et des comptes publics contre cette décision.

Le Conseil d’État a mis fin au débat dans sa décision N° 439354, en date du 21 juin 2021.

Dans cette décision prise par la réunion de deux chambres (la 3ème et la 8ème), le Conseil d’État a décidé d’annuler la décision de la Cour d’Appel de Lyon.

Il a en effet été rappelé que la Cour d’Appel avait fait une erreur de droit en statuant comme elle l’a fait, puisque comme le rappelle le Conseil d’État en son point 5 : « Aux termes de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable aux faits du litige : ” I. – Lorsqu’ils sont payés à des personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts, les produits de placement (…) sont assujettis à une contribution (…). / Sont également assujettis à cette contribution : / (…) / 2° Les plus-values mentionnées aux articles 150 U à 150 UC du code général des impôts. / (…)”. En vertu des dispositions combinées de cet article et des articles 1600-0 D, 1600-0 H, 1600-0 F bis et 1600-0 S du code général des impôts, dans leur rédaction applicable en l’espèce, les plus-values mentionnées aux articles 150 U à 150 UC du code général des impôts et les plus-values imposées au prélèvement mentionné à l’article 244 bis A du même code sont assujetties à la contribution sociale généralisée, à la contribution au remboursement de la dette sociale, au prélèvement social, à la contribution additionnelle au prélèvement social et à la contribution additionnelle au prélèvement de solidarité de 2 %. »

Le Conseil d’État a finalement conclu qu’au regard de ces dispositions : « les plus-values immobilières résultant de la cession de biens situés en France réalisées par des ressortissants français résidant à Monaco et non fiscalement domiciliés en France au sens de l’article 4 B du code général des impôts, qui sont soumises à l’impôt sur le revenu en application des articles 150 U à 150 UC du code général des impôts, sont assujetties aux contributions sociales citées au point 5 sur le fondement des dispositions du 2° du I de l’article L. 136-7 du code de la sécurité sociale. Par suite, en jugeant que ces plus-values de ces ressortissants ne pouvaient pas être soumises à ces contributions sur le fondement de cet article, au motif que ces plus-values étaient imposables en France sur le fondement de l’article 150 U du code général des impôts et non sur le fondement de l’article 244 bis A du même code, la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit. »

A toutes fins utiles, il faut rappeler que cette décision concerne les résidents monégasques de nationalité française et non pas les résidents monégasques qui ne sont pas de nationalité française.

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