Les nouvelles dispositions concernant les héritiers réservataires

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En droit français, vouloir déshériter un enfant est pratiquement impossible

En effet défunt avait sa résidence habituelle en France au moment de son décès, la législation applicable pour l’ouverture de la succession serait la législation française, en application de l’article 720 du code civil, qui dispose que « Les successions s’ouvrent par la mort, au dernier domicile du défunt. »

Dans cette hypothèse, en application de la législation française, il ne sera pas possible de déshériter un héritier (descendant), en vertu du principe de la réserve héréditaire.

Le principe de la réserve héréditaire, est la part du patrimoine du défunt qui doit obligatoirement revenir aux héritiers réservataires (les descendants) dans le cadre de la succession et sous réserve qu’ils aient été appelés et aient accepté la succession (Al. 1er de l’article 912 du code civil). En l’absence de descendant, c’est le conjoint qui bénéficiera de la réserve héréditaire.

Ce principe est d’ordre public, tel que mentionné plus haut et tel que rappelé à l’article 721 du code civil. Article, qui énonce qu’il n’est guère possible d’opérer des libéralités qui seraient en contradiction avec le principe de la réserve héréditaire, la seule possibilité étant d’opérer des libéralités sur la part de la quotité disponible.

En effet, la réserve héréditaire, ne concerne pas la totalité du patrimoine du défunt puisqu’une part doit rester disponible, cette part est nommée : la quotité disponible. Cette part du patrimoine du défunt non régie par la législation est librement disponible et permet d’effectuer des libéralités et ainsi gratifier un proche ou des tiers (Al. 2 de l’article 912 du code civil).

Le code civil a prévu la détermination de la réserve héréditaire et de la quotité disponible, selon le nombre d’héritiers réservataires. L’article 913 du code civil dispose que « Les libéralités, soit par actes entre vifs, soit par testament, ne pourront excéder la moitié des biens du disposant, s’il ne laisse à son décès qu’un enfant ; le tiers, s’il laisse deux enfants ; le quart, s’il en laisse trois ou un plus grand nombre. »

Ainsi, en présence d’un héritier réservataire, la réserve héréditaire et la quotité disponible seront de moitié chacune.

En présence de deux héritiers réservataires, la réserve héréditaire sera de 2/3 et la quotité disponible de 1/3.

En présence de trois héritiers réservataires (ou plus), la réserve héréditaire sera de 3/4 et la quotité disponible de 1/4.

Toutefois, lorsque le défunt avait sa résidence habituelle à l’étranger et que dans le pays de sa résidence de telle dispositions n’étaient pas prévues, il était possible que les héritiers réservataires soient lésés notamment sur le partage des biens immobiliers sis en France.

La Cour de Cassation avait déjà tenté de protéger ces derniers en rappelant que l’application de la loi étrangère ne devait pas « conduire à une situation incompatible avec les principes du droit français considérés comme essentiels » (C.Cass. 1ère ch. civ. en date du 27 septembre 2017, décisions n°16-13.151 et n°16-17.198). La Cour de cassation a ainsi posé deux conditions pour l’application de la loi étrangère, il faut qu’il y ait un lien significatif entre le défunt et le pays dont la loi successorale s’appliquera et il faudra en outre démontrer que les héritiers qui n’ont pas hérité, tel qu’ils auraient pu hériter dans le cadre de l’application de la loi française, ne soient pas dans une précarité économique ou dans le besoin.

Le législateur français a souhaité accorder une protection supplémentaire aux héritiers réservataires (tel qu’entendu au sens de la législation française), lorsqu’il est fait application d’une législation d’un autre état membre sur l’ensemble de la succession et que cette législation étrangère de disposait pas de dispositions similaires (relatives à la réserve héréditaire).

Ainsi, il a été promulgué une loi n° 2021-1109 confortant le respect des principes de la République, en date du 24 août 2021.

L’article 24 de cette loi prévoit une modification de l’article 913 du code civil, avec l’adjonction d’un alinéa rédigé ainsi : « Lorsque le défunt ou au moins l’un de ses enfants est, au moment du décès, ressortissant d’un Etat membre de l’Union européenne ou y réside habituellement et lorsque la loi étrangère applicable à la succession ne permet aucun mécanisme réservataire protecteur des enfants, chaque enfant ou ses héritiers ou ses ayants cause peuvent effectuer un prélèvement compensatoire sur les biens existants situés en France au jour du décès, de façon à être rétablis dans les droits réservataires que leur octroie la loi française, dans la limite de ceux-ci. ».

Cet article 24 de cette prévoit loi prévoit également un devoir d’information supplémentaire à l’égard du notaire en charge de la succession, avec notamment l’ajout d’un nouvel alinéa à l’article 921 du code civil, rédigé comme suivant :« Lorsque le notaire constate, lors du règlement de la succession, que les droits réservataires d’un héritier sont susceptibles d’être atteints par les libéralités effectuées par le défunt, il informe chaque héritier concerné et connu, individuellement et, le cas échéant, avant tout partage, de son droit de demander la réduction des libéralités qui excèdent la quotité disponible. »

La nouvelle rédaction de l’article 913 du code civil prévoit ainsi un prélèvement compensatoire pour les héritiers du défunt qui seraient lésés par l’application de la loi étrangère, sur les biens situés en France. Cette disposition sera applicable uniquement si la loi étrangère applicable ne prévoit aucun mécanisme relatif à la réserve héréditaire tel que bien connu de la législation française.

En sus, comme précédemment indiqué, le notaire aura un devoir d’information supplémentaire à l’égard de ces héritiers, si ce dernier constate que ces héritiers (ou un des héritiers) pourrai(en)t être lesé(s) par une ou des libéralités effectués par le défunt. Il portera ainsi à la connaissance de ces héritiers lésés ce fait afin que ces derniers puissent demander, le cas échéant la réduction des libéralités qui excèderaient le montant de la quotité disponible.

L’article n°24 de la loi n°2021-1109 entrera en vigueur : « Le premier jour du troisième mois suivant la publication de la présente loi et s’applique aux successions ouvertes à compter de son entrée en vigueur, y compris si des libéralités ont été consenties par le défunt avant cette entrée en vigueur ». L’entrée en vigueur de cette loi sera donc au 1er novembre 2021 et concernera toutes les successions ouvertes à compter de cette date.

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